dimanche 3 avril 2016

Vivre avec la maladie

C’est comme une épée de Damoclès. Quelque chose, tu ne sais jamais quoi, qui t’attend, tu ne sais jamais quand et surtout, tu ne sais pas pour combien de temps.

J’ai toujours cru que j’avais une bonne santé. Je ne me considérais pas vraiment comme une sportive, mais plutôt comme une femme active. Malgré mes jeunes années où j’étais tellement nulle en éducation physique… j’avais toujours zéro dans les push-ups et les sit-ups… l’activité physique est arrivée tard dans ma vie. L’important dans tout ça, c’est qu’un jour, j’ai bougé. Ça m’a toujours fait du bien.

Dans mon début de carrière, travailler auprès des aînés en perte d’autonomie en CHSLD m’a montré que je n’étais pas si invulnérable. Mais soyons honnêtes, qui peut passer indemne à travers des gastros qui se répandent comme une odeur de m@4de ;) et que dire de la saison hivernale avec ses rhumes qui n’en finissent plus. Mais tout de même, je croyais être en bonne santé. Et je l’étais quand même. En tout cas, certainement plus que maintenant.

J’avais même une opinion sur le cancer et ses traitements, que je considérais à l’époque comme de l’acharnement thérapeutique. Il était hors de question de me soigner si j’avais un cancer. Oubliez-moi pour les traitements de chimio et autres pour me donner 6 mois de vie supplémentaires et avoir l’air d’une loque. J’étais convaincue.

Je ne suis plus sûre de rien. Le cancer m’aura confrontée dans mes certitudes les plus profondes.

Aujourd’hui. Je vis avec la maladie. En fait, je vis avec l’absence de maladie. Je m’explique.

Oncologiquement parlant, je suis à un stade 3 d’un mélanome. Un cancer de la peau qui s’est transformé en métastases dans mes ganglions du cou. Dans les ganglions sentinelles qui avaient été enlevés lors de la première opération. Impossible dites-vous? C’est ce que je croyais aussi. Mais c’est une surprise de Mme Damo (lire Épée de Damoclès). Comment peut-il se développer des métastases dans des ganglions sentinelles, si ces derniers ont été enlevés et testés négatifs… j’créé ben qu’il en restait. Bref. J’ai pas cherché à comprendre ou à accuser.

Mon point est qu’on m’a proposé et fortement suggéré un traitement. Que j’ai fini par accepter de prendre. Avais-je vraiment le choix? Avec un ti-pout de 3 ans à la maison… mes certitudes étaient assez loin merci… Mon hésitation? La prise de médication à vie, bonjour le cocktail de pilules tous les jours avec les effets secondaires qui s’y rattachent, du moins pour le temps du traitement. Mais quand on parle de très long terme… on se dit que c’est terminé. Ma vie est foutue. Et m35de!



Et le traitement fonctionne. Assez pour diminuer les tumeurs pour qu’on ne les voie plus au scan. Cool. Donc théoriquement parlant, je n’ai plus le cancer? Alors, on arrête et ma vie reprend? YEAH! …Ben non…
- Mais pourquoi on continue?
- Pour éviter de se retrouver, on ne sait pas quand, avec un scan qui montre des tumeurs dans les organes et nous amener à un stade 4. Et donc, changer notre vision de qualité de vie à rester en vie.
- Ok, je vois la nuance. Ok, ben j’vas continuer finalement.

Et je continue le cocktail. Deux fois par jour, 7 pilules en tout. Pas la mer à boire.
Aujourd’hui, j’accepte donc (des jours un peu moins, par contre) de vivre avec la maladie. Parce que tant que je fréquenterai le service d’oncologie plusieurs fois par mois, je considère que je vis avec la maladie.

Et qu’est-ce que c’est vivre avec la maladie?

- C’est souffrir d’une grande fatigue: être souvent couchée le soir avant le petit; parfois passer ses journées devant la télé ou couchée sur son lit à regarder le plafond.

- Trouver le moment idéal pour prendre la médication: faut être à jeun 2 fois par jour pendant 3 heures. Pour une grignoteuse comme moi, ça été un peu complexe, mais j’ai trouvé! Victoire!

- De ne pas être concentrée à la normale: parfois distraite sur la route; distraite en payant les comptes, ne pas être capable de gérer 2 chaudrons quand je me sens en forme pour faire le souper – on mange donc ce qu’on mange… merci pour l’effort ;); commencer une phrase et ne plus savoir de quoi on parlait; de se promener à l’épicerie comme une âme en peine, ne sachant pas quoi faire.

- C’est avoir des bonnes journées: aller faire un 15 minutes de raquettes à neige, de profiter du beau temps, de tricoter, de cuisiner, de même faire le ménage ou encore de pelleter.

- C’est être alitée parce qu’on a trop bougé et profiter des bonnes journées. Mais je vis bien avec ça. Au début, je ne bougeais pas trop, en me disant de m’économiser, mais je ne suis pas du genre à vivre à moitié. Je profite donc de ce qui passe, quand ça passe.

- C’est avoir peur des récidives, des effets secondaires (développement de d’autres cancers, …)

- C’est faire le deuil du 2e bébé. Comment intégrer une nouvelle personne à cette famille. On «rushe» assez comme ça. C’est d’une tristesse.

- C’est remercier le ciel d’avoir eu un fils avant cette aventure. Il est du bonheur sur 2 pattes. Pas toujours évidemment! Il a presque 4 ans… tsé veut dire!

- C’est avoir un rhume et se retrouver hospitalisée pour 4 jours et annuler le voyage d’amoureux au Mexique. Et d’avoir peur de le repousser… d’un coup que ça arrive encore.

- C’est prévoir des activités et les annuler une par une, parce qu’on est soit trop fatiguée ou trop malade.

- C’est rêver de jogger, ne serait-ce que 10 minutes par jour. C’est aussi rêver d’aller porter le petit à la garderie en vélo.

- C’est avoir des groupes de soutien virtuels et en personnes ou des blogues qui ne parlent que de cancer mais où tu rencontres des gens merveilleux.

- C’est se faire des amies de salle d’attente!

- C’est lire tout ce qui existe sur le cancer et chercher ce que tu as bien pu faire de mal… et essayer de te corriger sans trop culpabiliser. Mais de lire qu’aujourd’hui, 75% des «cancéreux» survivent!

- C’est comprendre que le cancer, c’est complexe en titi!

- C’est essayer de trouver les bons côtés de tout ça.

- C’est se rendre compte qu’on a des amies et des familles merveilleuses.

- C’est expliquer à son fils que son rhume n’est pas grave et qu’il n’a pas besoin d’aller à l’hôpital, que la maladie de maman ça s’appelle un cancer. Et c’est différent.

- C’est vouloir marier son amoureux, parce que franchement, on n’aurait pas pu tomber mieux.

- C’est rêver de retourner travailler, parce que ça voudrait dire que ça va vraiment bien.

- C’est projeter retourner au travail, parce que ça va vraiment bien et BANG! Le rhume te tombe dessus et bingo au lit pour 3 jours. Je me sauve de l’hôpital cette fois-ci… ouf! Et me dire que franchement, c’est ridicule de gaspiller le peu d’énergie que j’ai à vouloir retourner travailler. Avec cette médication, je pense que ça ne sera pas dans le domaine du possible. Mais je dis ça, parce que j’ai fait de l’insomnie jusqu’à 3 heures cette nuit… check ben ça quand j’va être revenue su’l’piton! ;)

- C’est vivre dans l’inconnu. Complètement. Avec Mme Damo dans la pièce.

Vivre avec la maladie, c’est vivre, une heure à la fois. Et heureusement, elles se suivent mais ne se ressemblent pas! Hakuna Matata.


www.cancerfightclub.com blogue vivre avec la maladie

Aucun commentaire:

Publier un commentaire

Et l'après-cancer ?

J'ai eu 40 ans cette semaine. Je n'étais pas sûre de me rendre. Mais m'y voilà. :) HOURRA ! Fini la jeune adulte vivant avec u...