vendredi 25 août 2017

Lettre de remerciement à VOBOC

Chère équipe de Voboc.

Je ne sais pas où commencer pour vous expliquer à quel point notre expérience de voyage d’aventure avec des jeunes adultes atteints de cancer nous a été bénéfique, à mon amoureux et moi. Même notre fils, resté ici pendant le voyage en bénéficie.

Nous ne sommes pas les mêmes depuis notre retour. Nous allons vraiment mieux.
C’est comme si l’espoir perdu d’une vie meilleur était revenu.
C’est incroyable.

Survive and thrive cancer programs :
« Helping young adults with cancer not just survive… but thrive. »
« Authentic Community, Empowerment, Life to the Full, Risk,
Openness & Honesty, Experiential Learning.

Avant cette expédition - qui soit dit en passant est d’une qualité exceptionnelle (je suis récréologue de formation, j’ai organisé des événements au cours de mon parcours professionnel, ce voyage était de grande qualité) - je m’enfermais petit à petit dans la vie « post »cancer, sans grand espoir que cela aille mieux un jour. Vivant une heure à la fois, sans grand espoir de voir autre chose que les 4 murs de ma maison ou des quelques rues de mon quartier.
 
Je vous explique brièvement ma situation.
  

En 2013, j’ai eu un premier diagnostic de mélanome à 34 ans. Mon fils avait 15 mois.
On a détecté un cancer de la thyroide l’année suivante. Aucun lien avec le mélanome. Je suis juste...chanceuse!
En 2015, suite à une fausse couche, on détecte des métastases dans les ganglions du cou. Le mélanome s’est étendu. Je commence un traitement de thérapie ciblée (des pilules 2 fois par jour) qui aurait dû durer à vie, à tout le moins, on parlait de long terme.

Un an plus tard, en 2016, les effets secondaires sont trop importants, je fais des plans de suicide. Je prend donc la décision d’arrêter le traitement avant que mon chum me retrouve morte.

Et puisque je prends ce traitement pour offrir une maman à mon fils de 4 ans… me retrouver pendue n’est pas une option.

Je veux lui offrir, une vraie maman. À tout le moins, une maman avec toute sa tête et un minimum de vie. Je ne peux plus endurer d’être alitée, de n’être qu’un corps couchée dans ma chambre et que mes seules phrases sont : « Non mon chéri, maman est fatiguée ».

Je prends la chance de vivre avec le retour de la maladie, mais au moins, en attendant, la vie sera plus belle.

Et un an plus tard, grâce à votre contribution via VOBOC, mon fiancé et moi, partons pour une expédition de kayak avec Mikey Lang et son équipe. Nous n’y rêvions même pas, tellement cela semblait impossible.


Ce fût… juste WOW!



Imaginez-vous?! Je ne pensais pas que cela serait possible un jour encore. De partir en aventure. Dans ma vie de tous les jours, le quotidien me demande toute mon énergie. Je dois m’allonger entre les aller-retour à la garderie et la vaisselle. Si je veux m’occuper du souper, je dois prévoir d’être allongée au moins 3 heures avant...J’ai environ 2 heures d’autonomie. Ensuite, c’est repos obligatoire.

Alors, partir en expédition de kayak/camping sauvage… c’était impensable. Au niveau énergie, mais au niveau monétaire aussi.

Je ne travaille plus depuis le printemps 2015. Tout d’abord, la grande fatigue ensuite le traitement et maintenant les effets secondaires post traitement. Je ne sais pas si un jour j’arriverai à avoir un semblant de vie normale -comme avant. Vous savez : une maman capable d’aller travailler et de s’occuper de sa maisonnée et de sa famille… Pour l’instant, je suis invalide. J’ai 38 ans. L’invalidité affectant le moral, mais le compte de banque aussi.

Mais depuis cette expédition, le moral est meilleur. C’est comme s’il y avait autre chose que des rendez-vous médicaux et des siestes dans la vie.

Je vous écris tout ça et les larmes me montent aux yeux. J’ai passé un si beau moment. Merci.


Des vacances au loin avec mon amoureux. Vous imaginez? Quand le cancer est dans votre vie depuis 4 ans. Que plus ça va, plus c’est pire (le 2e cancer, les métastases, les séquelles,…) et là, on se retrouve au milieu du désert, dans la plus grande et merveilleuse nature, avec du monde qui comprennent. C’est difficile à expliquer, il n’y a pas de mot. Le bonheur, peut-être.

L’équipe de Survive and Thrive a été merveilleuse. Du premier contact avec Danielle, en me rassurant sur ma capacité à faire cette expédition (j’avais vraiment des doutes!!! mais puisque j’ai accès à un médicament qui me permet d’être focusée, de me concentrer et d’avoir un boost d’énergie, je m’y fiais beaucoup pour m’aider à passer au travers – j’ai bien fait, ce fut utile!) et pendant l’aventure (Matt et Myke sont empathiques, prévoyants, calmes et confiants et ont aussi eu le cancer).

De retour de notre aventure, je me sens plus sereine. C’est comme si maintenant, les choses étaient un peu plus possible.

Non, je ne suis toujours pas assez en forme pour travailler, mais je peux me permettre quelques activités en famille sans avoir peur. Je fonce un peu plus. Je me repose lorsque nécessaire, mais je fonce quand même.

De son côté, mon conjoint me fait un peu plus confiance. Il essaie de ne plus avoir peur de ma grande fatigue. Et pour l’instant, un peu plus d’un mois après notre retour, tout se passe bien. :)

Je tiens donc à vous remercier pour le don reçu. Vous avez été le seul organisme sollicité à nous aider financièrement et notre petite famille vous en remercie grandement!

Eliott, du haut de ses 5 ans, passe le meilleur été de sa vie. Il ne sait pas pourquoi, il comprendra plus tard.

Vous avez adouci ce périple qu’est le cancer.
Mille mercis.


Sarah
Août 2017


voboc.org

survivethrive.org



mardi 2 mai 2017

Accepter son sort !?

C'est la vie !

Accepter son sort. Ouin, pas sûre. Parce que la grande question, c’est : est-ce que je me prends pour une victime, que je m’assoie sur la maladie et je la prend comme excuse ou si je suis vraiment scrap?

Pour une fille qui a tendance au perfectionnisme et qui s’est tapée plusieurs dépressions à cause d’un abus de travail ou de contrôle, est-ce vraiment une question qui se pose? …
Mais d’un autre côté, c’est facile de se laisser prendre au jeu de la « Carte cancer : C’est pas de ma faute, j’ai le cancer ».

La difficulté vient donc de séparer, le manque de motivation de la maladie; la résilience du manque de volonté; ou le courage de l’entêtement!

Bonne chance!

Depuis mon périple cancer, j’ai la chance de rencontrer une psychologue spécialisée dans le cancer chez les jeunes adultes régulièrement. Ben, oui, 38 ans, c’est encore jeune;) Au cours des dernières années, nous avons travaillé sur ma capacité à accepter mon sort. Un gros morceau.

- Accepter mon sort? Comme dans : chu une larve et je l’accepte? j’pense qu’on ne se comprends pas, làlà! Criss, j’ai même pas 40 ans, j’ai pu de traces de cancer, ça PEUT PAS rester comme ça!
- Oui mais admettons que tu resterai dans cet état pour le reste de ta vie. Si aujourd’hui, durait. Si : "it is what is it! "
- Impossible.
- Ha oui?
- Je refuse. Je vais guérir. Je vais aller mieux. Ça se peut juste pas. NON! RE-FU-SÉ!

Et là, je me dis que je l’aime pas, c’te psy!

Et les mois passent. Et je ne vais pas mieux. Remarque, je ne vais pas pire, mais titi, je ne vais pas mieux. Alors, un choix s’impose. La résilience. Mais comment lâchez prise sans abandonner. Là, est toute la question.

Et comme elle fait particulièrement bien son job de psy, soit de semer une tite graine qui éventuellement poussera. L’idée a fait son chemin. Intérieurement, spirituellement et surtout pas publiquement. Je pouvais en parler à d’autres amies cancer. Elles sont dans le même bateau. Mais en parler aux « normaux » c’est plus ardu… ils vont vous sortir les phrases toutes faites, genre :

- Est-ce que tu fais de la visualisation? Est-ce que tu veux vraiment vivre?
- As-tu changer ta façon de penser?
- Change ton alimentation, arrête de stresser, médite!
- Fais du sport!

Vous voyez de quoi je parle? … Toujours plus facile de donner des conseils quand on n’est pas dedans. C’est comme quand je jugeais tout un chacun avant d’avoir un enfant...je parlais à travers mon chapeau. Tout en sachant que c’est pour mon bien, ou à tout le moins pour qu’ils se sentent mieux de t’aider avec ces conseils.

Et une partie de moi, est « normale », mon cerveau m’envoie déjà ce genre de jugement. Je n’ai pas vraiment besoin des autres pour ça.

Et puis un matin, je me suis levée et j’ai accepté. J’ai réalisé que si j’avais à vivre avec la maladie ou ses séquelles pendant 1 mois ou 10 ans. Aussi bien apprendre à vivre avec et avec le sourire idéalement.

De retour chez la psy :

- J’accepte mon sort!
- Ha oui? Raconte moi ça.
- Ben, depuis plusieurs mois, je n’ai aucune amélioration. J’avais un plan de guérison qui semble ne pas fonctionner (tsé, quelques mois à la maison sans traitement, j’aurai dû retourner travailler rapidement). Je suis toujours en convalescence et j’apprends à vivre avec. Chaque matin que je me réveille, je ne sais pas dans quel état je serai. Je ne sais pas comment se déroulera la journée.
En moyenne, je suis « bien » version cancer, c’est à dire 5\10, à peine plus d’une fois par semaine.
Je vois une ostéopathe, une acupunctrice, un naturopathe, un médecin de famille, une psychiatre, une psychologue, une massothérapeute, une ergothérapeute, un kinésiologue. Je mange le mieux possible (avec des écarts régulièrement, mais y’a un effort), je me repose entre 2 activités de la vie quotidienne (vaisselle, lavage, routine avec l’enfant). Je vais nager une fois par semaine. J’écris, je fais des lectures sérieuses mais pas trop. J’essaie de prendre l’air tous les jours. Je prends mes médicaments, mes produits naturels. À l’occasion, je médite ou je me dépose dans le moment présent. J’ai même une mini vie sociale.
Criss,je peux pas faire mieux.
Faque, j’accepte. That’s it. Que ça puisse rester comme ça. Parce que je ne vois aucunement de quelle façon, je pourrais changer quelque chose à tout ça. Je fais tout en mon pouvoir pour changer les choses que je peux changer. Mais il semble que j’ai pas de contrôle sur pas mal d’entre elles.
- Tu me rassures. Je voulais valider que tu ne t’asseyais pas sur la maladie.
- Je ne crois pas. Je continue à faire tout ce que je peux. Mais j’abandonne la recherche de résultat. Je fais ce que je peux. Point.


Et dans tout ça, j’essaie de trouver les points positifs. Sans toutefois dire merci à la maladie. Y’a des limites. Mais je peux apprécier le temps que je passe avec mon fils. J’ai arrêté les traitements afin de pouvoir passer du temps de qualité avec Chaton. Afin de lui offrir des souvenirs d’une vraie maman. Et je le lui offre. Il a une vraie maman, une maman plus fatiguée que les autres, mais il n’a plus une maman malade et alitée. C’est toujours ça de pris. Et lors de mes bonnes journées, je créer. Je couds, j’écris, je fais de l’artisanat, je peux même aller faire un peu de bénévolat à la garderie. Je prends du temps pour mes passions. Je pense même à finir l’album de bébé du Chaton… tsé 5 ans, faudrait que je le termine…;) j’ai même parfois un peu d’énergie pour faire l’amour à ma douce moitié.

La vie est belle.





mercredi 22 mars 2017

La culpabilité d'une maman avec un cancer


La grande question à savoir si je suis une bonne maman m’a effleurée l’esprit dans les derniers mois, mais c’est suite à une conversation avec une « amie cancer » que la réflexion s’est vraiment amorcée. On parlait d’accepter notre sort pis on s’est mise à pleurer sur nos enfants, sur comment on n’était pas des bonnes mamans. Comment on aurait mieux fait de ne pas en faire - tsé, en plein resto… bravo les filles ;) - Mais bon, c’est pas grave, avec la maladie y’a des bouttes d’orgueil qui ont disparus! Faque braillons et tant pis pour la serveuse qui ne sait plus trop où se mettre. Ça aura le mérite de relâcher les tensions.

La maternité, avec ses hauts et ses bas de plusieurs kilomètres de distance, m’a montré le pire comme le meilleur. Mon dieu que j’en ai vécu des émotions depuis que ce petit être est arrivé dans ma vie. Pas que j’en n’avais pas vécues avant, mais tout est plus intense avec un enfant. C’est comme être sur l’ecstasy, mais de l’amour et de la fatigue. En alternance. Des montagnes russes, tsé. Ça, c’est la vie normale de parents. Avoir la responsabilité totale d’un autre être m’a transformée. Et si insouciante j’étais; inquiète et coupable, je suis devenue. Bref, je suis une maman.

Pis là, tu ajoutes les facteurs stress, inquiétudes et épuisement (et ne me sortez pas la fameuse phrase : « oui, mais on est tous fatigués ». Ne-non, la fatigue du cancer, c’est comme une fatigue sur l’ecstasy (j’en parle comme si j’en avais déjà fait… c’est une image, tsé ). Est fichtrement fatigante, la fatigue. En fait, le mot fatigue n’est pas adéquat, c’est une mauvaise traduction de l’anglais. On devrait dire épuisement.) Et la culpabilité, déjà présente, prends du poids.

Suis-je une bonne mère?
En fais-je assez? Trop?
Est-il heureux? Assez stimulé? Trop?
Sera-t-il équilibré? Traumatisé?
Une maman qui disparaît à l’hôpital, ça choque, non? Il est si jeune… blablabla
Une maman qui dort plus que lui, c’est bizarre, non?
Dois-je – puis-je – en faire plus? si seulement, j’en étais capable!

Autant de questions que de situations.

Je sais bien que toutes les mamans se sentent coupables. Je ne sais pas pourquoi, l’amour inconditionnel, j’imagine. On veut le meilleur pour notre progéniture. On a donc la culpabilité facile. Je pense que je peux dire que les mamans avec le cancer, la ressente aussi. Je ne sais pas si c’est pire. On dirait qu’on se sent coupable d’être malade. Tsé comme si on n’avait pas assez de pression – genre celle de guérir. Faut qu’on se rajoute celle-là.

Peut-être à cause du côté « préventif » du cancer. Dans le sens de « as-tu vraiment TOUT fait pour éviter ça? » non? Pis t’as fait un petit pareil?? Coupable! Peut-être pas, non plus. Y’a plein de cancers et de maladies dont on ne connaît pas les causes. À moins qu’on se mette à chercher dans le psychosomatique, pis là, ben BINGO : « comment ça ?!? t’as pas réglé tes problèmes avant de faire des enfants!? Tsé veut dire. Mère indigne. »

Je me demande ce que j’offre à cet enfant. Une maman fatiguée, une maman malade, une maman impatiente, une maman qui se sauve en vacances parce qu’elle recherche le silence. Une maman qui ne peut pas lui offrir de frère ou de sœur. Une maman qui risque de mourir dans sa petite enfance.

Pis c’est là que cette réflexion amène le « si j’avais su », j’en n’aurai pas fait d’enfant. Tant qu’à lui offrir une vie de tristesse et de deuil et de « maman est fatiguée, mon chaton ». Tsé.
Et c’est cet enfant qui vient me faire un bisou, m’offre son doudou et ferme ma porte « pour ne pas me déranger ». Ça crève le cœur. De tristesse mais de fierté aussi. Qu’il est empathique, du haut de ses 4 ans.

Je sais, c’est rushant comme réflexion. Je veux le protéger. Je ne veux que son bonheur. Même si je sais tellement que la vie n’est pas que bonheur et amour. Et c’est ça qui fait que je me pose la question. Je ne veux pas qu’il souffre.

Mais qui aurait pu savoir? Le c#&@ de cancer ne s’annonce pas d’avance. Tsé.
Et on l’en remercie, égoïstement, parce que si on avait su pis qu’on n’en aurait pas fait, j’aurai manqué les câlins, les grands bonheurs du quotidiens, les ‘mamans je t’aime’, les déguisements, les jeux et les jouets qui traînent partout, les p’tits souliers dans l’entrée. Les toutous qui restent avec moi pour me tenir compagnie pendant que l’enfant va vivre sa vie de petit garçon. Et sa présence, qui malgré tout, me sauve la vie.

Et je pense à tout ceux et celles qui en auraient voulus et que la cigogne a ignoré. Et qui me lisent me plaindre le ventre plein.

Mais tout part d’une bonne intention. Je veux le meilleur pour lui. Et des fois, ben je me demande si le meilleur aurait été une autre maman. Sincèrement.

Heureusement pour moi, il n’y a pas de mère parfaite. Cancer ou pas. Je voudrais ben, mais même si j’avais tout pour être la parfaite petite maman, j’aurai des hormones qui me feraient me questionner quand même. C’est humain. C’est féminin.

Non, je ne suis pas une mauvaise mère. Pas plus que celle qui travaille et qui court après son temps. Pas pire que la dépressive qui se cherche dans sa grise de vie, pas plus que la monoparentale absente une semaine sur deux, pas plus que la maman à la maison qui fait son possible avec le sourire.

Et je suis toujours en vie. À moi de lui offrir mon meilleur pour le temps qu’il reste, une heure à la fois. Et il deviendra un enfant sensible à autrui, empathique. Ça fera déjà ça de pris!

Le mieux que je puisse faire, c’est d’être une maman heureuse. Peut-être pas à tous les instants, mais une maman heureuse sera toujours mieux qu’une maman qui se sent coupable. Et s’il faut que je parte me ressourcer régulièrement, en bien, ressourcement, il y aura! Non, je ne suis pas une mauvaise mère. Parce que je suis la sienne. La seule qu’il a. Pour le temps que ça durera. Et perdre ce temps précieux en culpabilité, c’est vraiment pas nécessaire.


Après tout, c’est bien connu : « être un parent, c’est faire ce qu’on peut, pas ce qu’on veut. » Cancer ou pas.

Crédit photo : Geneviève Boucher

Et l'après-cancer ?

J'ai eu 40 ans cette semaine. Je n'étais pas sûre de me rendre. Mais m'y voilà. :) HOURRA ! Fini la jeune adulte vivant avec u...